Réussir sa reconversion dans la viticulture : dispositifs et parcours à connaître

Viticulture : un secteur ouvert à la reconversion professionnelle

La viticulture française, pilier économique et culturel avec ses 800 000 emplois directs et indirects (source : FranceAgriMer), attire chaque année de nouveaux passionnés venant d’horizons variés. Beaucoup de salariés, de demandeurs d’emploi ou d’entrepreneurs en quête de sens choisissent aujourd’hui de se réorienter vers la terre et la vigne. Cette dynamique a été renforcée par les nouvelles attentes autour de la transition écologique, mais également par une évolution du rapport au travail après la crise sanitaire.

Pour réussir cette transition, plusieurs dispositifs d’accompagnement se sont imposés comme des références : Validation des Acquis de l’Expérience (VAE), Compte Personnel de Formation (CPF), accompagnement de l’AFPA, mais aussi de nombreuses formations labellisées ou innovations locales. Faire le point sur chacune de ces solutions permet de baliser le chemin vers une reconversion réussie dans la filière viti-vinicole.

Par où commencer : analyser son projet et faire un bilan de compétences

Avant d’activer les dispositifs de formation ou de certification, un temps d’introspection s’impose. Le bilan de compétences constitue le premier pas indispensable pour évaluer ses motivations, identifier ses atouts transférables, et clarifier ses envies. Il s’adresse aussi bien aux salariés, fonctionnaires, indépendants qu’aux demandeurs d’emploi, et il peut être financé par le CPF ou Pôle emploi.

  • Objectif : confronter son projet à la réalité du secteur (conditions de travail, saisonnalité, exigences physiques, compétences techniques, perspectives salariales, etc.).
  • Durée : généralement 24 heures, réparties sur plusieurs semaines.
  • Outils : entretiens, tests, enquêtes métier, immersions de terrain, coaching individuel (source : Ministère du Travail).

Près de 70% des personnes ayant suivi un bilan de compétences en 2022 ont modifié ou affiné leur projet initial (source : DARES), soulignant son intérêt pour préparer une reconversion solide.

Valider son expérience : la VAE dans la viticulture

Accéder rapidement à un diplôme de la filière sans repartir de zéro, tout en valorisant ses précédentes expériences, c’est possible avec la Validation des Acquis de l’Expérience (VAE). Cette procédure permet d’obtenir, de manière partielle ou totale, une certification reconnue (CAP Agricole, BPA viticulture-œnologie, BTSA viticulture-œnologie, etc.) sur la base de l’expérience terrain, qu’elle soit professionnelle, associative ou bénévole.

  • Conditions d’éligibilité : justifier d’au moins 1 an d’expérience (salariat, bénévolat, volontariat).
  • Étapes :
    1. Dépôt d’un dossier de recevabilité auprès d’un organisme certificateur (comme le ministère de l’Agriculture, les Chambres d’agriculture, ou les établissements agricoles publics/privés).
    2. Constitution d’un dossier argumenté, illustrant les compétences acquises — notamment en taille de la vigne, conduite du vignoble, protection phytosanitaire, travail du sol, vinification, commercialisation selon la certification visée.
    3. Passage devant un jury d’experts (oral + dossier écrit).
  • Accompagnement : recommandé, souvent financé par le CPF ou la Région.

En 2021, près de 9 000 personnes ont obtenu tout ou partie d’un diplôme agricole par la VAE (sources : Ministère de l’Agriculture, Réseau VAE). La filière viticole est particulièrement attentive à ce dispositif, compte tenu de la variété des profils qu’elle recrute, du saisonnier au chef de culture.

Le CPF : donnent accès à une large palette de formations viticoles

Le Compte Personnel de Formation offre depuis 2015 la possibilité d’accumuler des droits à la formation professionnelle tout au long de la vie active. Chacun dispose d’un budget, exprimé en euros (500€/an, plafond à 5 000€ pour la plupart des actifs, 800€/an pour les moins qualifiés, plafond à 8 000€), qui peut être mobilisé pour financer tout ou partie d’une formation reconnue.

  • Catalogue viticole :
    • Formations diplômantes : CAP Agricole Métiers de l’agriculture option viticulture, BPA travaux de la vigne et du vin, BTSA viticulture-œnologie.
    • Certificats de spécialisation : taille de la vigne, conduite d’engins agricoles, commercialisation vins & spiritueux.
    • Modules courts : Initiation à la dégustation œnologique, maîtrise de la biodynamie, viticulture raisonnée, tractoriste viticole.
  • Exemples de coûts : 3 jours d’initiation à la taille (autour de 350 €), préparation au BTS en alternance (4 500 à 7 000 € selon les établissements, mais prise en charge possible).
  • Accès : via la plateforme Mon Compte Formation.
  • Particularités : le CPF peut majoritairement s’utiliser en dehors du temps de travail, sous réserve d’accord de l’employeur si la formation s’effectue sur le temps de travail.

Depuis 2019, plus de 10 000 mobilisations du CPF ont permis d’accéder à des certifications agricoles, et la demande augmente de 15% chaque année dans le secteur de la viticulture (source : Caisse des Dépôts, 2023).

Formations longues et accompagnement : le rôle clé de l’AFPA et du réseau public

Pour les adultes en reconversion totale, notamment les demandeurs d’emploi ou personnes éloignées de l’emploi, l’AFPA (Agence nationale pour la Formation Professionnelle des Adultes) reste un acteur de référence.

  • Domaines proposés : plusieurs centres AFPA en France proposent des titres professionnels tels que :
    • Ouvrier viticole
    • Agent viticole polyvalent
    • Technicien de chai
    • Responsable de production viticole
  • Spécificités :
    • Formules longues, entre 3 et 9 mois, avec alternance d’enseignements pratiques et théoriques.
    • Mises en situation réelle sur des exploitations partenaires.
    • Insertion professionnelle générale de 78% six mois après la formation, selon les chiffres AFPA 2022.
  • Financement : formations gratuites ou financées par Pôle emploi, Régions, CPF, OPCO, selon votre statut.

Ce parcours peut également être consolidé par des titres diplômants du ministère de l’Agriculture, à l’instar du Brevet Professionnel Agricole ou du BTSA.

Se lancer : démarches, astuces et points de vigilance

La reconversion vers la viticulture doit s’accompagner d’une préparation sérieuse et, idéalement, d’une première expérience sur le terrain :

  • Stage ou immersion professionnelle : De nombreux employeurs acceptent des stages d’observation (PMSMP, PMSMPE - Pôle emploi) ou des contrats saisonniers courts, véritables tremplins pour comprendre la réalité du métier.
  • Mobilisation des réseaux locaux : Chambres d’agriculture, Cités des métiers, Bureaux d’information jeunesse, Pôle Emploi, Missions Locales peuvent guider vers les dispositifs adaptés et orienter vers des formations qualifiantes très localisées (par exemple, « ouvriers tractoristes » recherchés dans le Bordelais, profils « taille et palissage » dans la vallée du Rhône, etc.).
  • Échanges avec des professionnels en poste : Les collectifs locaux et les forums (Vitisphere, Réseau CIVB…) regorgent d’opportunités pour questionner les réalités du terrain et affiner son projet.
  • Prudents sur les promesses : Certains organismes de formation privés ou non référencés sur la plateforme Mon Compte Formation peuvent proposer des offres moins pertinentes ou non prises en charge financièrement.

À noter : selon l’ANFA (Association nationale pour la formation automobile), les métiers de la vigne font partie de ceux les plus porteurs d’emploi dans le monde agricole, avec près de 22 000 recrutements attendus chaque année jusqu’en 2025 (hors saisonniers).

Zoom : parcours réussis et retours d’expérience

Plusieurs profils illustrent la diversité des réussites en reconversion dans la viticulture :

  • De la finance à la taille de la vigne : Céline, ancienne cadre à Paris, a opté pour un CAP Métiers de l’Agriculture via le GRETA, financé par le CPF. Aujourd’hui salariée polyvalente dans le Mâconnais, elle évoque « un apprentissage exigeant mais gratifiant, grâce au mentorat de collègues aguerris » (source : LSA Agriculture).
  • Technicien de laboratoire devenu vigneron bio : Marc a obtenu un BPA en passant par la VAE, fort de plusieurs années de bénévolat sur une exploitation familiale. Il a ensuite suivi une formation courte à la biodynamie avec un financement régional dans le cadre de son installation.
  • Saisonnier devenu chef d’exploitation : Tamir, ancien saisonnier marocain, a rejoint une exploitation girondine via un contrat professionnel AFPA, puis a progressé jusqu’à reprendre l’exploitation à la retraite du propriétaire (source : France 3 Nouvelle-Aquitaine).

Retours communs : l’importance du réseau, de l’expérience concrète et de la motivation à toutes les étapes du parcours.

Pour aller plus loin : ressources utiles et innovations à surveiller

  • Viticulture Emploi : plateforme de mise en relation entre candidats et exploitants.
  • Réseau VAE des diplômes agricoles : démarches VAE, points de contact.
  • Mon Compte Formation : catalogue de formations éligibles CPF.
  • AFPA : accès aux formations professionnelles adultes agricoles.
  • Vinseo : réseau d’innovation viti-vinicole, pour découvrir les nouveaux métiers et formations (robotique, agriculture de précision, certification HVE, etc.).

Perspectives viti-agricoles : diversité des possibles et dynamique de la filière

Le secteur viticole accueille chaque année des profils très variés, qu’ils soient en quête de reconversion, de sens ou de nouveaux défis techniques et écologiques. Grâce à la diversité et à la complémentarité des dispositifs comme la VAE, le CPF ou l’AFPA, il devient possible de construire un projet qui conjugue compétences, diplômes, et immersion progressive dans un univers où savoir-faire traditionnels et innovations se rencontrent. Quelle que soit la porte d’entrée, la réussite passe toujours par l’implication, la curiosité et la volonté de s’inscrire dans un tissu professionnel solidaire et passionné.

Sources principales : FranceAgriMer, Ministère du Travail, DARES, AFPA, France 3, Caisse des Dépôts, Réseau CHLOROFIL, Réseau CIVB.

Pour aller plus loin