Avec en moyenne 22 % de tourteau de soja, les aliments pour volailles restent dépendants des importations, malgré le plan de développement des protéines en France. Même si les surfaces en soja non OGM et tracé augmentent régulièrement dans l’Hexagone (180 000 ha en 2020 pour un objectif de 250 000 ha), l’Hexagone est loin d’être autosuffisant. Il dispose toutefois d’autres sources protéiques, dont le colza qui s’est peu à peu taillé une place dans les formules pour les ruminants et dont le projet Vocalim, cherche à comprendre l’intérêt en volailles. Il est en effet moins concentré en protéines que le soja. Mais en le “blutant,” comme le font les meuniers pour le blé grâce à des tamisages successifs, il est possible d’augmenter sa teneur en protéine, et dans le même temps, de réduire sa teneur en parois de 25 %. Le tourteau bluté est donc moins fibreux.
Toutefois, la croissance des animaux n’est pas forcément celle qu’on pourrait attendre si l’on ne s’en tenait qu’à la composition nutritionnelle de la formule des aliments. Pour établir les formules alimentaires, les valeurs énergétiques pour une matière première, par exemple le blé, sont obtenues par une méthode “par différence” comparant plusieurs formules d’aliments comprenant les produits qu’on souhaite comparer. Si les valeurs observées sont différentes, alors les chercheurs considèrent que les valeurs de chaque matière première ne s’additionne pas et, donc, qu’il y a bien une interaction (parfois positive, parfois négative) entre les matières premières.
Un effet qui dépasse celui des seules fibres
Les chercheurs d’Arvalis ont noté, depuis plusieurs années, que le blé est moins valorisé par le poulet dans un aliment contenant du tourteau de colza plutôt qu’avec du soja. L’idée de l’essai conduit dans le cadre de Vocalim est de comprendre si cet effet négatif est lié aux fibres. L’essai compare donc la valeur nutritionnelle du blé incorporé dans trois aliments qui diffèrent par leurs sources de protéines : le tourteau de soja qui sert de témoin, le tourteau de colza bluté et le tourteau de tournesol HiPro bluté, ces deux derniers étant donc moins riches en fibres. La digestibilité des nutriments du blé (amidon, matière azotée totale, énergie) est comparée sur des poulets mâles de souche Ross PM3 à 24 jours de vie.
Amidon moins digeste
Ce test confirme que les valeurs énergétiques du blé sont proches quand il est associé avec un tourteau de soja ou un tourteau de tournesol hipro bluté (3457 et 3388 kcal/kg MS). Mais, elles restent significativement inférieures lorsque le blé est associé au tourteau de colza même s’il est bluté (différence de 276 kcal/kg de MS). Cet écart de valeur énergétique du blé s’explique en partie par la diminution de la digestibilité de l’amidon (-2,7 points), mais aussi de la protéine (-6,2 points) par rapport à la valeur obtenue en présence de tourteau de soja seul. “Ces valorisations du blé, obtenues par une méthode de calcul par différence, mettent en avant des interactions entre le tourteau de colza bluté et le blé, comme cela avait été le cas pour d’autres tourteaux de colza plus fibreux lors des essais précédents” confirme Justine Danel (Arvalis). Une partie des nutriments contenus dans le blé n’est donc pas entièrement digérée quand il est distribué avec du tourteau de colza. Les chercheurs poursuivent des essais pour comprendre ce phénomène.