Quatre cents à 500 manifestants pour soutenir le prix du lait avec la FDSEA et le CDJA. Ils n’ont même pas demandé à être reçus par le préfet, se contentant de lui faire porter une motion. […]
FDSEA et CDJA ont fixé le rendez-vous à 21h ce jeudi 27. La foule gonfle jusqu’à 22 h passées : soutenir le prix du lait ne dispense pas de traire les vaches. Une fois réglés ces problèmes d’intendance, ils sont 400 à 500 manifestants sur la place Jean-Moulin [Laval], derrière ces grilles qui leur étaient interdites le 14.
Le prix du lait, sur le feu depuis plusieurs semaines
C’est qu’une réunion de l’interprofession doit se tenir le lendemain en Basse-Normandie. A l’ordre du jour, le prix du lait, sur le feu depuis plusieurs semaines, et que certains transformateurs ont déjà baissé d’un centime par litre.
Or jusque-là, l’ambiance de la soirée n’est à la hauteur ni de l’enjeu, ni de leur angoisse : comme le rappelle Gabriel Madiot, le quota moyen en Mayenne tourne autour de 150 000 litres. En temps normal, veaux et vaches de réforme (au moins) complètent le revenu. Seulement aujourd’hui, les veaux ne trouvent plus preneurs, les vaches sont bradées, et il fait sec, surtout dans le sud du département où le maïs commence à donner des inquiétudes.
"T’nez, m’sieur l’préfet. V’là du lait qu’nos pourciaux n’en voulant plus" : des sacs plastiques volent vers la façade blanche de la préfecture. Tous ne contiennent pas du lait, tant s’en faut : huile de viande et lisier puant s’écrasent sur les toits, dans les jardins, dégoulinent noir sur blanc.
La tension monte avec le temps qui ne passe pas, faute de réaction en face. Un feu est allumé sous les couleurs, un autre carbonise des déchets urbains… Les résineux crépitent. Quelques pointes dorées sont sciées sur les grilles, et le bruit agaçant d’une barre de fer qui ripe sur les barreaux, s’acharne sur un volet métallique, énerve cette première "nuit blanche". […]
Avec des cris de rabatteurs, les CRS sortent au pas de course et chargent. Les manifestants reculent par paquets, reviennent, repartent. Les grenades chuintent leurs lacrimonieuses fumées. On tousse, on crache, on rit : les CRS ont cassé l’enseigne d’un restaurant. Avec une grenade ? ou l’une de ces balles caoutchouc dont on retrouve les douilles ?
Rage, dans les rangs : "On peut bien crever. Tout le monde s’en fout. Personne ne nous écoute. Ni le préfet, ni les autres. Il aurait pu venir nous écouter."
Gabriel Madiot est conscient du problème : "Nous ne pouvons pas continuer à descendre dans la rue chaque fois qu’on menace de baisser le prix du lait. Il faut trouver une autre solution. Quand il y aura suffisamment de GIE de collecte dans le département pour que les transformateurs soient contraints à la négociation, ce sera différent."
En attendant, il préfère "voir un producteur peinturlurer les murs de la préfecture plutôt que d’entendre dire qu’il s’est mis la corde au cou". Maryvonne Arzul