Ce sont deux jeunes qui ont bien failli ne pas passer la crise qui a frappé la production caprine il y a quelques années. Guénolé Perrault s’était installé sur l'exploitation de son père en 2003. Guillaume Alusse, fils d’éleveurs de veaux de boucherie et vaches allaitantes à 15 km de là, l’avait rejoint en 2009. Mais peu de temps après, c’est une sorte de malédiction qui a frappé l'exploitation. La chute du prix du lait d’abord d’environ 120 euros les 1 000 litres. Ensuite, des problèmes de conservation d’aliment (maïs-triticale) qui ont dégradé la valeur nutritive des céréales, entraînant immédiatement une chute de la production laitière. Puis une acidose chronique a frappé le troupeau. En deux mois, ce sont une centaine de chèvres qui ont été retrouvées mortes dans le bâtiment et 200 autres taries. Enfin, les chevrettes, elles, ont subi des problèmes pulmonaires, à cause d’une mauvaise ventilation de leur bâtiment.
“Il y a deux ans, en juin, on s’est donné trois mois pour se décider à tout arrêter, raconte aujourd’hui Guillaume Alusse. Si les lactations ne redémarraient pas en septembre, c’était fini”. Finalement, la production est repartie, “le prix du lait est remonté et il n’a jamais été aussi haut qu’aujourd’hui”. Mais les problèmes sanitaires n’ont pas été effacés d’un trait de plume. Les affections pulmonaires qui ont frappé les chevrettes sont irréversibles et l’élevage en paye encore les conséquences. La moitié du cheptel souffre de ce handicap, “c’est comme si elles n’avaient qu’un seul poumon”. La production globale demeure inférieure à la moyenne des élevages caprins : 720 litres contre 850 litres.
“Le séchoir et l’autonomie alimentaire nous a sauvés”
Ce qui leur a permis de survivre, pendant ces années de disette, ce sont les charges alimentaires très réduites. “L’autonomie alimentaire nous a permis de passer la crise” se félicite aujourd'hui l’éleveur. Ici, on a en effet choisi d’acheter le moins possible et de produire au maximum sur l’exploitation : 75 à 80 % de la surface sont destinés à l’autoconsommation. “Cela me plaît de tout maîtriser de A à Z, de planter la graine dans la terre et à la fin de vendre le lait à Eurial” glisse l’éleveur. C’était la première ferme de Maine-et-Loire à s’équiper d’un séchoir de foin en grange, en 2003, quand Guénolé Perrault s’est installé. Un investissement audacieux car les banques freinaient des quatre fers. Le foin séché en grange, de très bonne qualité, a permis de réduire les frais vétérinaires, assure l’éleveur. “Cela a aussi permis de diminuer sensiblement les achats de correcteur azoté.” Mais les chèvres produisent un peu moins qu’avec du maïs ensilage.
Le séchoir ici c’est aussi du confort pour les éleveurs : “L’été comme l’hiver, on n’a pas à démarrer un seul tracteur pour nourrir nos chèvres, on reste à l’abri toute l’année, on n’a pas à décacheter le tas d’ensilage sous
la pluie !”
Avec un prix du lait élevé et des problèmes sanitaires réglés, les deux éleveurs sont confiants pour l’avenir. “On a changé de protocole de suivi vétérinaire, on ne prend plus aucun risque, on a augmenté les antibiotiques, pour repartir sur de bonnes bases. Le prochain investissement sera un aménagement du bâtiment chevrettes.”
Antoine Humeau